L'année 1984-1985 de l'enseignement de Cornelius Castoriadis à l'EHESS a été consacrée pour l'essentiel à Thucydide. L'auteur a voulu en particulier montrer, à travers l'analyse de l'Oraison funèbre attribuée par l'historien à Périclès, à quel point la grande création démocratique athénienne du Ve siècle fut consciente d'elle-même.
Mais Castoriadis - sans céder aux anachronismes et aux projections auxquels les interprétations de l'historien ont trop souvent succombé de nos jours - retrouve également chez Thucydide un monde par certains côtés étonnamment semblable au nôtre, dans lequel des biens qui nous semblent précieux à l'intérieur de certaines frontières ne semblent plus compter au-delà, où seule la force prévaut ; un monde aussi dans lequel la dynamique de l'opposition entre des pôles de puissance aboutit à des conflits ouverts où les calculs rationnels se tissent inextricablement avec les passions.
Cornelius Castoriadis (1922-1997) s'installa en France en 1945, après des études de philosophie, d'économie et de droit à Athènes. Cofondateur du groupe et de la revue Socialisme ou Barbarie, économiste à l'OCDE (1948-1970), directeur d'études à l'EHESS (1980-1995), psychanalyste (1973-1997), il a publié au Seuil L'Institution imaginaire de la société (1975) et six volumes (dont un posthume) des Carrefours du labyrinthe (1979-1999). Ont paru après sa mort les recueils Une société à la dérive (2005), Fenêtre sur le chaos (2007) et Histoire et création. Textes philosophiques inédits (1945-1967) (2009). L'ensemble des séminaires de l'EHESS est en cours de publication au Seuil sous le titre La Création humaine : Sur Le Politique de Platon (1999), Sujet et vérité dans le monde social-historique (2002), Ce qui fait la Grèce, 1. D'Homère à Héraclite (2004), La Cité et les lois. Ce qui fait la Grèce, 2 (2008). |