Illustrations de Christophe Blain, scenario Joann Sfar
Je saute à l'eau pour sauver Ulysse. Mon maître bondit à son tour dans la mer en furie. Notre bateau s'éloigne. La tempête se calme...
Revoilà Héraclès (demi-dieu très costaud) et Socrate (demi-chien parlant) débarquant à Ithaque. Fatigué des débordements sexuels de son maître — "il est épuisant avec sa bite, celui-là" —, Socrate souhaite l'inciter à se fixer et fonder une famille. Or, quel plus beau modèle d'amour conjugal que le roi Ulysse, époux de Pénélope ? Mais ils trouvent Pénélope en larmes, car Ulysse, après avoir fait des pieds et des mains pour rentrer au foyer, vient de se tirer sans explications. N'écoutant que sa libido, Héraclès console Pénélope, et, dans le même élan, éventre Télémaque (fils d'Ulysse et Pénélope) venu défendre l'honneur de sa mère.
Ηa démarre très fort. Coincé entre différents "personnages littéraires de premier ordre" — Homère (six mètres de haut, poète, cyclope, aveugle) et Ulysse (une femme, trois gosses, vingt maîtresses, une guerre mondiale et un penchant pour les garçons) —, Socrate va en prendre plein la poire, connaître la trahison, la violence, la tendresse (d'une femme moche mais caressante) et même un bonheur éphémère avec le grand poète aveugle. Une aventure philosophique, sexuelle et guerrière formidablement drôle — les dialogues et les commentaires du toutou sont étincelants — servie par un graphisme somptueux. Aventure à l'issue de laquelle, lassé du fonctionnement humain, le chien fidèle choisit la liberté. Malgré la peur, "ni dieu ni maître" est donc sa devise à l'aube de sa prochaine aventure, Œdipus Rex. |