Selon les propos de l'auteur lui-même, L'Ignorance n'est ni un roman politique, ni un texte autobiographique – même si le roman commence par la rencontre, dans un aéroport, de deux « dissidents » de l'Est réfugiés en Europe de l'Ouest, qui retournent pour quelques jours dans leur pays d'origine. L'ignorance, ici, ne fait pas allusion aux lacunes de la connaissance, mais précisément aux côtés inconnus de la nature humaine, qui ne se révèlent pas dans la fadeur du quotidien, cachés qu'ils sont derrière le « rideau de la normalité », mais qui surgissent au grand jour dans des situations historiques exceptionnelles – comme la période de la Terreur sous la Révolution française. À partir de cette notion d'ignorance comme lacune existentielle, Milan Kundera s'interroge sur la mémoire, et surtout sur l'oubli, qui à ses yeux prend le pas sur le travail de la mémoire : « De quoi je me souviens ? De très peu de choses. Et l'autre ne se souvient pas des mêmes choses. C'est donc une non-rencontre, mais qui est voilée par l'émotion. Mais, dès que la situation subit une vraie analyse, vous vous rendez compte de la présence de l'oubli. » Romancier et essayiste, Milan Kundera est né en Tchécoslovaquie en 1929. Après la publication dans son pays natal de La Plaisanterie (1965), qui lui vaut une notoriété immédiate, et de Risibles amours (1968), il est victime de la répression soviétique après l'écrasement du Printemps de Prague. Ses livres sont interdits, il est privé de son emploi et n'a plus le droit de publier. Dès 1975, il émigre en France où il vit toujours (il prendra la nationalité française en 1981). Toute son œuvre est depuis directement publiée en français par les Éditions Gallimard. |