Il est peu de personnages historiques qui aient suscité autant d'admiration et enflammé autant d'imaginations qu'Alexandre le Grand, le souverain macédonien qui, en un peu plus de dix ans, de 334 à 323 avant notre ère, s'empara de l'immense empire perse de Darius III et conduisit son armée jusqu'aux rives inconnues de l'Indus. Devenu dès l'Antiquité un héros de légende, il demeura au cours des siècles le modèle de tous ceux qui, à un moment de l'Histoire, aspirèrent au pouvoir suprême. Peu d'acteurs posent pourtant à l'historien autant de problèmes. Les récits se rapportant à son extraordinaire épopée lui sont au moins postérieurs de trois siècles et n'aident guère à porter un jugement sur l'homme, son comportement et ses desseins. Reste que le monde méditerranéen oriental après Alexandre n'est plus ce qu'il était avant lui. Et que son bref règne de treize ans marque la fin, non seulement du puissant empire construit par le Perse Cyrus à partir du milieu du VIème siècle, mais aussi de la civilisation grecque classique, dont Athènes avait été le modèle pendant plus d'un siècle et demi. Le bassin méditerranéen sera désormais aux mains de monarques, à la tête des vastes Etats nés de la conquête d'Alexandre, qui fonderont leur autorité sur son héritage. Au-delà du simple récit d'une vie, particulièrement brève dans le cas d'Alexandre qui mourut à trente-trois ans, Claude Mossé s'est efforcée de comprendre comment et pourquoi il fut amené à entreprendre cette formidable aventure qui le conduisit à jouer plusieurs rôles : tour à tour roi des Macédoniens, chef de la coalition des Etats grecs, puis successeur des Achéménides et fils de Zeus promis à la domination du monde. Elle a tenté de cerner l'homme réel qui se dissimulait derrière tous ces masques, de mesurer l'ambition qui nourrissait ses actes, et leurs conséquences pour les temps à venir. Enfin, elle s'est attachée à reconstituer la genèse et la destinée de ce mythe qui présente, tant en Occident qu'en Orient, des formes souvent contradictoires, du héros illustré par le fameux Roman d'Alexandre au monarque absolu encensé par la France des XVIIème et XVIIIème siècles. Elle réussit ainsi avec brio à relever ce pari audacieux de livrer une nouvelle et décisive biographie d'Alexandre, dans laquelle le style limpide et didactique le dispute à la rigueur synthétique. |